Comme dans beaucoup d’hôpitaux en France, les personnels du Centre Hospitalier Public du Cotentin subissent et combattent tous le jours les conséquences de la Loi HPST (Hôpitaux, Patients, Santé et territoires) appelée plus communément, Loi Bachelot (du nom de celle qui l’a mise en œuvre) et qui entraîne progressivement et inéluctablement une marchandisation de la santé.
Faire toujours plus avec moins de moyens, c’est devenu la dure réalité des personnels hospitaliers et ceci dans tous les services. Les agents donnent le maximum d’eux-mêmes afin que les patients et les consultants dans les services de l’hôpital ainsi que les résidents dans les EHPAD, subissent le moins possible les néfastes conséquences de cette loi. Mais ils s’épuisent et beaucoup d’entre eux n’en peuvent déjà plus !
Et il faudrait encore en rajouter !
En effet, la direction, pressée par l’Agence Régionale de Santé, a concocté un nouveau plan d’économies afin de tenter réduire le déficit cumulé de l’établissement qui s’élève à 21 millions d’€ .
Un plan d’économies de plus, nous direz-vous… il est vrai que cela fait plus de six ans que cela dure, que les personnels et les usagers en subissent les tragiques effets sans que l’on ne voit poindre le bout du tunnel. On a déjà rogné sur tout !
Ce nouveau plan d’économies drastique s’il est mis en place va encore dégrader d’avantage et de façon catastrophique les conditions de travail des personnels et les conditions d’hospitalisation et d’accueil des usagers de notre établissement.
Ce dispositif prévoit la suppression de 150 postes, la mise en place de journées de travail de 12 heures avec alternance jour/nuit obligatoire dans les services qui réclament pourtant la plus grande vigilance et une haute réactivité et technicité des personnels : les soins intensifs de cardiologie et de neurologie, les urgences, le SMUR, la maternité, la néonatalogie, la pédiatrie, mais aussi la gynécologie, le service sécurité … soit environ 400 personnes pour l’instant, mais ce n’est qu’un début, un ballon d’essai.
Ce plan d’économies prévoit aussi un allongement de la période des congés annuels d’été du 1ier juin au 30 septembre, la suppression de jours de RTT, la suppression des heures supplémentaires des cadres, un nombre de mises en stage insuffisant…
La direction aurait bien voulu « associer » les personnels et les organisations syndicales à l’acceptation et la mise en place de ces mesures d’économies. Elle n’ a pas lésiné sur la méthode : réunions d’information, réunions de pseudo-négociation, où tout était écrit d’avance et où aucunes de nos remarques n’ont été prises en compte.
Pour conclure ce semblant de dialogue social, un protocole d’accord a même été proposé à la signature des organisations syndicales… contre quelques mesurettes compensatoires. Comment la direction peut-elle imaginer un instant que le personnel et ses représentants puissent avaliser de tels reculs et toutes ces mesures sociales restrictives qui ne touchent que les personnels non médicaux ?
Lors d’une ultime rencontre, le directeur général s’est montré sous son véritable jour et nous a déclaré méprisant : « Si vous n’êtes pas d’accord, c’est que vous n’avez pas compris ! » Il se propose de faire début juin, 3 « réunions pédagogiques » destinées à une explication de son texte aux personnels.
Pour marquer notre profond désaccord, nous avons décidé de ne plus participer aux réunions et aux instances tant qu’il n’y aura pas une réelle avancée de la Direction.
Car accepter ce protocole d’économies, c’est mettre le doigt dans l’engrenage infernal et destructeur de la loi Bachelot. C’est un effort et des sacrifices inutiles, car l’année suivante il faudra recommencer, en donner d’avantage, supprimer encore des emplois, supprimer encore des lits, supprimer encore des services, et rogner encore sur les droits des personnels. Le déficit ne pourra jamais être maîtrisé où comblé.
Car il n’est pas uniquement le fait de mauvaises gestions ou de problèmes d’organisation locaux comme certains voudraient le faire croire, mais sont bien dus à une insuffisance de financement au niveau national.
C’est la Loi de Financement de la Sécurité Sociale qui détermine l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Pour sortir de cette spirale infernale, il faudrait que le taux d’évolution de cet ONDAM soit supérieur à 3.2%. C’est une estimation de La FHF (Fédération Hospitalière de France) qui regroupe tous les directeurs d’établissements publics de santé. Or pour l’année 2013, il est passé de 2,5 à 2,7 % il manque donc encore au moins 0.5 % pour stopper les suppressions de postes dans les établissements, affirme t-elle !
C’est aussi la tarification à l’activité (T2A) qui oblige les établissements à augmenter leur activité de 2% chaque année dans le cadre des enveloppes fermées de l’ONDAM, entraînant une baisse des tarifs et donc des recettes des établissements.
C’est bien la loi HPSTqui est responsable des restructurations et recompositions du paysage sanitaire et médico-social qui se poursuivent et s’accélèrent. Cette loi est toujours en place malgré les nombreuses critiques exprimées y compris par la majorité actuelle lorsqu’elle était dans l’opposition.
Que sont devenues les promesses et les engagements du candidat François Hollande ?
Que sont devenues les promesses et les engagements de Marisol Touraine, ministre de la santé. Que sont devenus les beaux discours de septembre 2012 énoncés lors de la mise en place du pacte de confiance et qui laissaient espérer des avancées allant dans le changement tant promis?
Oubliés, abandonnés ou reportés à des dates ultérieures, ils préfèrent faire la part belle aux dictats européens et patronaux. Hormis la fin de la convergence tarifaire public/privé, au delà de quelques belles paroles, et de quelques aménagements cosmétiques, nous ne voyons pas grand-chose de bien venir : Rien sur l’abrogation de la loi HPST, sur les pouvoirs de ARS, sur la nouvelle gouvernance des hôpitaux, l’abrogation des ordres professionnels, rien sur l’emploi, les salaires et les conditions de travail…
L’absence d’ambition pour un nouveau système de financement de l’hôpital public est contradictoire avec la volonté de redonner à l’hôpital public toute sa place.
Nous avons rencontré Mme Gosselin (députée), Mr Houllegatte (maire de Cherbourg/Octeville et président du Conseil d’établissement du CHPC), Mr Godefroy (sénateur) et Mr Travert (député) pour les sensibiliser à nos problèmes et pour leur demander d’intervenir. Nous avons écrit à Mr Cazeneuve (Ministre du Budget), mais cette lettre est à ce jour sans réponse. Nous aurait-il oubliés ?
Nous avons rencontré l'ARS le mercredi 29 mai à Caen …
Une vrai rupture avec l’organisation du système de santé, tel qu’il est conçu par la loi HPST, est urgent… Nous ne nous contenterons pas de son simple toilettage.
Partout sur le territoire, des mobilisations, comme la votre, voient le jour, rassemblant les salariés, les usagers et des élus. Elles portent essentiellement sur le maintien d’une offre sanitaire et sociale publique de qualité, la réponse aux besoins des usagers, le maintien et le développement de l’emploi, l’amélioration des conditions de travail qui ne cessent de se dégrader, les salaires, une réelle reconnaissance des qualifications, un parcours professionnel permettant de vraies évolutions de carrière et une attractivité de nos métiers.
Il est urgent que ces divers mouvements convergent et deviennent une force qui soit capable d’imposer au président Hollande et à son gouvernement de reprendre le cap des engagements si vite oubliés.
L’Hôpital n’est pas une entreprise, la santé n’est pas une marchandise !